« Iodysséus coche toutes les bonnes cases pour l’avenir du Finistère »

Arnaud Gourret, directeur de la filière mer du Credit Agricole
du finistère

Via sa Fondation, le Crédit Agricole du Finistère apporte officiellement son soutien au projet Iodysséus qui crée du lien entre course au large, recherche scientifique et biotechnologies. Ce lien est au cœur de l’action de la Filière Mer du Crédit Agricole Finistère : une banque « verte » qui voit l’avenir en « bleu ».

Iodysséus - C’est ici, en Finistère, que tout a commencé voilà cinq ans par la création de la première Filière Mer au sein du Crédit Agricole : première d’une série qui s’allonge de plus en plus. L’idée c’est que la fameuse « banque verte » devienne bleue ?

Arnaud Gourret. En Breton, « Glaz » désigne un bleu-vert spécial. C’est la couleur de notre marque et aussi le nom du voilier de course-croisière qui incarne l’écurie d’accès à la mer que nous avons mise en place (un JPK, made in Bretagne par Jean-Pierre Kelbert, NDLR). En vérité, des métiers comme l’algoculture ou la pêche sont proches du métier d’agriculteur, avec les mêmes préoccupations de la ressource passant désormais par la recherche de modèles durables. Dans l’appréciation du risque également, les modèles d’activité et les acteurs ne sont pas étrangers aux pratiques et modes de fonctionnement du Crédit Agricole. Depuis l’origine, nous nous sommes appuyés sur les sachants pour bien appréhender les spécificités du secteur maritime. Nous avons commencé par interviewer une centaine de professionnels en leur demandant ce qu’ils attendaient d’un banquier, quelle était leur vision de l’économie bleue. Nous leur avons dit : « Nous, on ne sait pas, vous allez nous former ». C’est ainsi qu’a été initiée cette démarche vers le relais de croissance que constitue l’énorme potentiel de la mer, une démarche portée par une vision propre au Crédit Agricole du Finistère.

Iodysséus - Comment décrivez-vous cette vision particulière du CA concernant la mer ?

Arnaud Gourret. Au-delà d’un strict rôle de banquier, La Filière Mer de notre Caisse régionale agit comme un instigateur de synergies, un agrégateur de talents ou, si vous voulez, comme un créateur de liens au service de l’économie bleue en Bretagne et en particulier dans le Finistère. Dans le secteur du nautisme, par exemple, cela aboutit au projet « Finistère Mer Vent » bâti autour de la personnalité de Jean Le Cam avec le pays Fouesnantais et ses acteurs. Nous avons en l’occurrence poussé notre modèle coopératif jusqu’à nous impliquer directement comme porteurs de projet aux côtés des professionnels. Ici le scénario n’est pas écrit. Nous le défrichons au jour le jour. Ce qui nous intéresse c’est ce que nous laisserons plus tard comme héritage, c’est de parler d’horizon.

Iodysséus - Avec son technopôle, ses universités (UIEM , UBO), son Campus mondial de la Mer ou encore le Pôle Mer Atlantique Bretagne et le voisinage de la Station biologique de Roscoff, Brest porte une grande ambition concernant les bioressources marines de demain. Comment la soutenez-vous ?

Arnaud Gourret. Le Village by CA installé aux Capucins, dans le cœur de Brest, où nous nous trouvons, est une matérialisation de ce soutien. La chance spécifique de Brest c’est, outre les institutions que vous citez, une forte concentration d’acteurs autour de la mer au sens large, avec de grands acteurs comme IFREMER, Naval Group, la Marine nationale, Thalès … L’ambition que vous évoquez, nous en sommes partie prenante puisque nous sommes, entre autres, partenaires du Pole Mer Bretagne Atlantique, du Campus mondial de la mer, de Bretagne Pôle Naval et que nous siègeons au conseil stratégique de la Station Biologique de Roscoff dans la perspective de la création d’une Silicon Valley européenne des biotechnologies marines. Notre rôle, appuyé par notre fondation, consiste à faire le lien entre les mondes de la recherche et de l’entreprise dont dépend concrètement demain l’industrialisation du territoire. Nous contribuons à l’essor d’une économie bleue.

Iodysséus - Quels sont les freins à cet essor ?

Arnaud Gourret. Nous voyons beaucoup d’entreprises implantées à Brest qui travaillent à l’international et qui ont des difficultés à se faire reconnaître ici, sur le territoire. La force du Finistère, c’est que nous sommes capables de nous mobiliser pour des causes fédératrices. La faiblesse de cette force, c’est que des acteurs ou des couches multiples cherchent à porter en parallèle un même objectif. C’est pour cela qu’aujourd’hui nous revendiquons ce rôle premier de créateur de liens pour favoriser un développement territorial en résonnance directe avec l’orientation géophysique de la pointe bretonne. Concrétiser cet immense potentiel passe par les nouveaux canaux d’information que nous avons développés et qui vont permettre de valoriser les porteurs d’initiatives, de booster leur image en leur conférant un crédit ou une crédibilité. Comme cela est vrai pour Iodysséus.

Iodysséus - Comment avez-vous entendu parler du projet Iodysséus et quels éléments vous ont motivé ?

Arnaud Gourret. En premier lieu, la dimension humaine, celle de notre rencontre avec Eric Defert. Cela illustre l’intérêt et la force du réseau et de la proximité. J’étais présent lors de votre présentation à laSea Tech Week de Brest en octobre dernier. La volonté exprimée de créer du lien entre la recherche, la course au large et le monde de l’entreprise représentée par des acteurs industriels comme Codif et Polymaris, m’ont interpellé. Ce lien est l’alliage de l’avenir. Aujourd’hui, nous avons d’une part la recherche fondamentale et de l’autre la recherche appliquée qui se mêlent peu ou pas. Ces deux mondes séparés, le modèle anglo-saxon les a depuis longtemps intégrés. Aujourd’hui en France, nous courons après un tel modèle où l’industriel donne les moyens au scientifique de chercher, à travers un pool ou un consortium. C’est ainsi que l’on va créer de la valeur, de la richesse en termes d’applications industrielles et de création d’emplois. Dans la mesure où nous, Crédit Agricole, facilitons et boostons ce nouveau modèle, à l’échelle du territoire, nous allons dans le (bon) sens de l’Histoire. Avec la Station biologique de Roscoff nous avons semé des graines. Dans cet esprit, nous accompagnons aujourd’hui des initiatives pour développer un centre d’excellence à l’échelle internationale. L’objectif c’est que, demain, des entreprises s’implantent, créent de l’emploi sur le territoire et renforcent son attractivité.

Iodysséus - Quelle est la place dans ce dispositif de l’aventure Iodysseus mêlant course au large et science ?

Arnaud Gourret. Justement Iodysséus participe à générer cette attractivité s’agissant de tenter ce qui n’a jamais été tenté auparavant : capter des molécules dans les embruns ou aérosols océaniques à partir d’un bateau de compétition. En soi, l’idée peut sembler défrisante. Et c’est en cela qu’elle est intéressante, par l’ouverture d’esprit dont elle témoigne et qu’elle requiert. Une ouverture qui est un antidote au conformisme. Attention, à la Filière Mer du Crédit Agricole on ne prend pas tous les dossiers. En revanche, quand on sent que sont réunis l’originalité, un objectif clair et un frémissement scientifique on sait s’arrêter sur la proposition. A cet égard, Iodysséus cochait donc à nos yeux toutes les cases qui méritaient qu’on s’y intéresse.

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